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Dans le prolongement de son activité de programmation, la Bibliothèque publique d’information a proposé, de 2008 à 2010, en collaboration avec le service de la Parole du Centre Pompidou, des rendez-vous réguliers d’analyse de films. Cinq cycles de conférences ont été confiés à cinq personnalités, réalisateurs, critiques, enseignants : Jean-Louis Comolli, Sylvie Lindeperg, Daniel Deshays, Carole Desbarats et Bernard Eisenschitz. En leur permettant de développer leur réflexion sur plusieurs séances, et en explorant différentes formes d’écritures cinématographiques, l’objectif était d’élaborer collectivement une pensée critique sur l’image Ces cinq cycles de conférences sont rendus disponibles aujourd’hui sous forme de 22 podcasts à écouter et à télécharger. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Location:

United States

Description:

Dans le prolongement de son activité de programmation, la Bibliothèque publique d’information a proposé, de 2008 à 2010, en collaboration avec le service de la Parole du Centre Pompidou, des rendez-vous réguliers d’analyse de films. Cinq cycles de conférences ont été confiés à cinq personnalités, réalisateurs, critiques, enseignants : Jean-Louis Comolli, Sylvie Lindeperg, Daniel Deshays, Carole Desbarats et Bernard Eisenschitz. En leur permettant de développer leur réflexion sur plusieurs séances, et en explorant différentes formes d’écritures cinématographiques, l’objectif était d’élaborer collectivement une pensée critique sur l’image Ces cinq cycles de conférences sont rendus disponibles aujourd’hui sous forme de 22 podcasts à écouter et à télécharger. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Language:

French


Episodes
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Regards critiques S02-E05 : Paysage

11/28/2022
Cette dernière séance nous permet de considérer le son direct, ferment du cinéma documentaire. Le genre à propos duquel le preneur de son Antoine Bonfanti disait : « le son y est politique ». Ici Loznitsa engage une grande liberté de forme, tant avec l’image qu’avec le son. Son film nous montre comment le son peut engager notre regard à scruter l’image plus loin encore. Il nous incite à penser la forme comme dispositif d’analyse. Comment faire mieux entendre un réel saturé, fouiller dans le surgissement des paroles ? Ici, l’évacuation de tout commentaire – voix off et musique – favorise l’attention. Le peu de synchronisme permet mieux à l’auteur de construire librement la progression de son récit. Pas à pas, les voix directes nous disent l’état de souffrance du pays. Et le spectateur associe ce qui est séparément offert à son œil et à son oreille, imaginant en sous-main un synchronisme à l’ouvrage. Avec : Daniel Deshays, ingénieur du son Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:45:02

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Regards critiques S02-E04 : Libera Me

11/23/2022
L’exemple est suffisamment rare pour devoir le montrer. Après Thérèse (1986), voilà un long-métrage de fiction qui, en raison de son contenu – la privation de liberté, la liquidation d’une population – abandonne dialogue et musique pour ne faire confiance qu’aux sons. Pourquoi une telle radicalité ? Comment ce principe peut-il tenir face à l’exigence de notre écoute insatiable, habituée à recevoir des films surchargés? De combien de sons a-t-on besoin pour faire « tenir » une image? Face à ce modèle, il faudrait consulter Une histoire du cinéma de Jean-Luc Godard pour interroger l’épaisseur de ses sons. Comment peut-on distinguer et choisir dans la masse sonore? Comment faire un parcours d’écoute, dans la multiplicité instantanée des données qui nous sont si souvent offertes par le mixage? Autant d’interrogations qui nous permettront de questionner l’hypothèse de l’épaisseur, d’une « verticalité » sonore cinématographique. Avec : Daniel Deshays Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:47:12

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Regards critiques S02-E03 : Stalker

11/13/2022
Le passage dans l’autre monde s’effectue en draisine. La persistance de modulation du roulement du wagonnet introduit peu à peu le spectateur à la conscience du sonore du film. La découverte du reste suivra, ou pas, car le reste du sonore ne sera plus jamais autant souligné. La projection unique ne suffit pas à faire apparaître le son; il serait nécessaire de faire retour plusieurs fois sur l’écoute. Pour être repéré, le son nécessite une réécoute. Or le cinéma travaille savamment à faire disparaître la conscience de ses sons. Ou plutôt, c’est le synchronisme, comme résolution mutuelle (son d’une image et image d’un son) qui enfouit le sonore dans son effet de fusion. Dès la première scène, la matérialisation du silence par les échos lointains engage notre attention. Le dépaysement demeure tout au long de la longue quête que constitue le film. Ici, le son n’arrive jamais pour rassurer, tout surgissement conduit au silence et avec lui l’attente inquiète se prolonge. Avec : Daniel Deshays, ingénieur du son Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:47:26

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Regards critiques S02-E02 : Lucebert, temps et adieu

11/7/2022
C’est la grande liberté prise par Van der Keuken qui nous étonne dans ce triptyque consacré à l’œuvre du peintre et poète hollandais Lucebert. Il approche la démarche de l’artiste, activant par le son autant l’à-plat des images que les espaces extérieurs qui entremêlent leurs couleurs. Il offre tour à tour au son et à l’image la place de la pâte colorée ou bien de la figure. Sa confiance dans la musique de son temps n’a d’égale que celle qu’il porte à ses sons, et cela tout au long de son œuvre. Plus encore, il garde toujours la main sur sa musique, allant jusqu’à la ralentir pour qu’elle s’offre plutôt comme matière que comme illustration. Si, contrairement à Tati, c’est dans le son direct qu’il puise ses énergies, ici les sons se libèrent de l’excès des liens synchroniques qu’ils ont trop l’habitude de subir. Les liens sont libres, le geste domine sur la toile comme avec l’intensité des sons. Van der Keuken nous trace un chemin dans la stratification enfin rassemblée des sons et des images. Avec : Daniel Deshays, ingénieur du son Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:00:59

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Regards critiques S02-E01 : Mon Oncle

10/21/2022
Mais de quel son veut-on parler ici ? Qu’aurait-il de si sensationnel ? Eh bien justement, cette faculté de s’adresser directement à nous par la sensation autant que par le sens. Le son s’introduit discrètement par la pertinence de son ajustement avec une partie de l’image. Cette adéquation simple s’effectue par la raréfaction nécessaire à la désignation. Par surgissement, on désigne avec le son ce qui de l’image doit être activé. Pour la première séance, c’est un modèle de désignation qui va nous aider à mieux cerner ce propos. Mon Oncle, film situé à l’apogée de la démarche sonore de Jacques Tati, s’avère être de ce point de vue l’exception, c’est un aboutissement, un modèle pédagogique. Aucune règle n’est transposable à tous, c’est ce que ce nouveau cycle nous révèlera. Aucun modèle, chaque film appelle sa propre pensée, chaque réalisateur doit, et pour chaque film différemment, opérer un ajustement sonore. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Daniel Deshays Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:09:05

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Regards critiques S01-E10 : Close up

6/27/2022
Documentaire ? Fiction ? L’un et l’autre, sans cesse et absolument. Kiarostami reconstitue un fait divers dont le cinéma est la matrice, l’enjeu, le territoire. Un imposteur se fait passer pour un cinéaste connu et entraîne une famille tout entière dans le cercle de la croyance. Il est arrêté et jugé pour cette imposture. Mais au cours du procès – filmé – l’imposteur tient un discours de vérité qui renverse la situation. Tous les personnages sont interprétés par les vrais personnages. Les reconstitutions requièrent des personnes réelles qu’elles rejouent pour le film ce qu’elles avaient déjà vécu. Elles deviennent de ce fait actrices d’elles-mêmes. Comme l’est l’imposteur à sa manière. Cet entrelacement entre réalité et jeu caractérise ce film qui reprend à des années de distance la parole prémonitoire du Carrosse d’or (Jean Renoir, 1953): « Où finit le théâtre, où commence la vie? ». Dans l’Iran des années 90, la société semble ne plus tenir qu’à l’influence du cinéma, seule instance à même de maintenir quelque lien social, à permettre quelque rencontre entre les puissants et les faibles, les riches et les pauvres, les professionnels et les amateurs, les cinéastes et leurs spectateurs. Peut-être est-il dans le destin de chacun d’entre nous, aujourd’hui, de devenir acteur d’un film, personnage dans un film, réalisateur d’un film? La société du spectacle est sans doute le triomphe de l’aliénation; elle est aussi, désormais, ce par quoi chacun se trouve confronté à sa vérité, et à s’exposer au désir de l’autre. Que le spectateur y perde ses repères, qu’il les y trouve. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:56:50

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Regards critiques S01-E09 : Disneyland, mon vieux pays natal & Scènes de chasse au sanglier

6/27/2022
Deux films récents au programme. J’ai rapproché ces deux films car ils creusent l’un et l’autre le rapport problématique entre prise cinématographique et prise de réel. Comment rencontrer pour le filmer ce réel qui se dérobe ? Que peut-on faire de ce qui disparaît quand on le filme? Avec celui de la mort, filmée, racontée, le thème de la disparition est commun aux deux films. Au terme ou presque de cette traversée de l’histoire du cinéma sous influence…, nous savons que le cinéma dit « documentaire » est capable des plus grandes opérations de fiction. Que faire de la mort dans un film qui ne soit pas la réduire à l’inconsistance rassurante de la virtualité, à l’amusement d’un jeu ? Mais aussi: comment articuler dans un film le dépli du sens et le noué des formes? La pointe la plus vive du cinéma actuel travaille cette relation – nécessité et cohérence – entre le sens et la forme, la lutte des idées et la conspiration des écritures. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:00:47

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Regards critiques S01-E08 : Histoire du Japon racontée par une hôtesse de bar

6/14/2022
Quelle vérité scandaleuse, quelle force subversive, quel trouble ne naissent-ils pas de la parole filmée à condition qu’elle soit, comme ici, écoutée avec patience et constance, qu’elle soit prise et reprise avec obstination. Mais aussi: comment l’histoire avec un grand H passe-t-elle par l’intime des corps ? Comment la violence politique, l’exhibition des amours et le trafic des familles peuvent-ils se montrer à ce point entrelacés ? L’Histoire du Japon racontée par une hôtesse de bar réussit cette performance rare dans l’histoire du cinéma de conjuguer la vie triomphante d’une femme dans tous ses états de corps et d’esprit, et l’histoire d’un pays vaincu, dépendant, soumis. Filmée, cette femme quelconque devient personnage extraordinaire; sa parole se déploie sans gêne sur une scène débarrassée de tout impératif moral; ce qu’elle raconte, sans hors champ et sans hypocrisie, prend le ton d’un cynisme tranquille et souriant; les intérêts égoïstes du sujet ne sont plus masqués, on ne triche plus, et le cinéma, bon gré mal gré, enregistre cet affaiblissement de tout surmoi comme la chose la plus naturelle du monde. Nous sommes aux antipodes des programmes de télévision actuels qui étalent comme un sale secret le détail d’une « vie privée », avec le projet de nous faire jouir du dépeçage spectaculaire des vices cachés. Rien de tel ici. Le cinéma d’Imamura ne nous laisse aucune chance de voyeurisme; le corps et la parole de l’hôtesse de bar transpercent les plus improbables turpitudes; tout se tient et se déroule dans le monde de l’élémentaire, la pulsion, la répétition, la structure. La dimension documentaire est ici la garantie que le corps filmé n’est en effet pas celui d’une autre. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:43:45

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Regards critiques S01-E07 : Classe de lutte

6/14/2022
À dix ans d’intervalle, ces deux films dits « militants » posent la question cruciale de l’émergence du sujet dans la lutte sociale. Tel serait aussi l’héritage de 68: qu’il ne s’agit plus de lutter au nom des autres, classe, groupe, syndicat, mais de reprendre le fil de la lutte sociale en son nom propre, depuis sa position subjective, en sachant ce qu’il en coûte et ce que l’on y gagne. Quoi? Une parole vraie, hors de tous les langages convenus. Un courage qui n’est plus breveté. Une sortie des routines qui est une autre manière de leur redonner la vie qui s’était retirée d’elles à force d’obéissance. Suzanne n’obéit plus qu’à ses convictions, plus puissantes que les ordres qui l’encadrent. Renée, Christine sont aussi en rupture de règles. L’amour, la vie amoureuse, la vie familiale sont des lieux de la mobilisation sociale. Comment le cinéma dit « documentaire» s’y prend-il pour déjouer les cadres? Pour faire émerger la parole vivante d’un sujet (trois femmes, en l’occurrence, et ce n’est pas pour rien)? Pour entraîner les militantes vers une affirmation d’elles-mêmes qui apparaît aujourd’hui comme le geste révolutionnaire majeur? Eh bien, il fait en sorte que les personnes filmées agissent vraiment dans les films, sans réciter aucune leçon, sans répéter aucun geste de ceux qui sont admis, sans se référer à une autorité qui les contraindrait, et pas non plus celle du cinéma qui cadre et qui attend. Un jour, peut-être, il sera devenu évident que le surgissement d’une parole libre est un événement politique majeur. Que la forme de la parole est facteur de sens. Qu’il y a des paroles toujours déjà calibrées et d’autre qui ne le seront jamais. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:03:09

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Regards critiques S01-E06 : Let There Be Light

6/8/2022
Le cinéma et la guerre (la 2ème). Trois films entre 1942 et 1946, dont deux à travers quelques citations: Desert Victory (Roy Boulting, 1942-43), Memory of the Camps (Sidney Bernstein, 1945-85), Let There Be Light (John Huston, 1946). L’hypothèse qui court ici est que la place du spectateur et les modalités de son désir de croire dans le cinéma ont changé après 1945 et la mise en circulation des images tournées au moment de la libération des camps de la mort nazis par les Alliés. Quand les Britanniques tournent en 1942 la bataille d’El Alamein pour en faire, en cas de victoire, un film de propagande (Desert Victory), le cinéma est au faîte de sa puissance. On ne craint pas de tourner en studio près de Londres, avec des figurants, les scènes de l’offensive nocturne qui manquent dans les plans documentaires de la vraie bataille. Le faux et le vrai coexistent sans l’excuse du docu-fiction. Le spectateur croit au subterfuge et n’y voit aucun truquage. Trois ans plus tard, quand les Britanniques libèrent le camp de Bergen Belsen (Basse Saxe), tout change. Les images qui arrivent à Londres font peur. Va-t-on croire à une violence dans l’horreur, jamais représentée? Pour la première fois, se pose la question de croire en l’authenticité d’une série d’images documentaires. On fait donc appel à Alfred Hitchcock qui propose une rhétorique de l’attestation de la nature documentaire de ces images: trop fortes pour êtres vraies? Croire ne va plus de soi: il faut des renforts, des garanties. C’est un tournant. L’année suivante, John Huston se propose de restaurer quelque chose de la puissance perdue du cinéma en filmant la guérison des soldats traumatisés par les batailles qu’ils ont vécues. Le magnifique Let There Be Light, comme son titre le propose, confronte le cinéma au miracle du retour à la vie. Il s’agit de croire à nouveau. La magie ne serait-elle pas morte ? Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:16:30

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Regards critiques S01-E05 : Terre sans pain

6/8/2022
Terre sans pain est un étrange film, qui reste soixante-dix ans plus tard aussi scandaleux qu’en son temps. Encore une fois, ce « documentaire » est fabriqué comme une fiction. Répétitions, prises multiples, mise en scène, découpage… il s’agit pour Buñuel de contrôler la réalité des Hurdes, de ne pas se laisser griser ou gagner par la charge de réel, et donc de charme ou de mystère, que rencontre inévitablement tout tournage documentaire. Pourquoi? Tout simplement pour pouvoir noircir le tableau à souhait, écarter du film tout ce qui risquerait d’atténuer l’impression recherchée, celle d’une misère, d’un malheur sans fin ni remède. Car Buñuel ne veut pas que le sort épouvantable des Hurdanos suscite sentiments de compassion ou de pitié. S’exerce là un refus majeur de tout ce qui pourrait ressembler à une charité humaniste de souche chrétienne. Plutôt que la pitié, la révolte. Nous aurions voulu porter assistance à ces pauvres hères sur qui s’acharne un sort hostile? Bien, allons-y voir: le film nous guide, nous associe à sa visite, mais c’est pour nous faire arriver trop tard. Le mal est déjà fait. Irrémédiable. C’est bien au spectateur que s’en prend le film, pour le saturer de tant d’images d’un malheur sans appel qu’il lui sera interdit de se considérer plus longtemps comme étant du bon côté de l’écran. Ce n’est pas seulement la situation lamentable des Hurdes qui nous insupporte, c’est cette insistance obsessionnelle d’ajouter de la mort au malheur, de fermer le film comme une tombe, qui finissent par excéder toute « bonne place » de spectateur. Le cinéma ici n’est plus fait pour améliorer le monde mais pour le refuser tel qu'il est. Un film subversif parce qu'il s'en prend au spectacle de la misère et au confort du spectateur. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:06:15

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Regards critiques S01-E04 : Moi un noir

6/1/2022
Nous sommes à la veille de l’entrée en scène du son synchrone. La caméra 16mm Éclair-Coutant est sur le point de naître. Mais quand il tourne Moi, un Noir, Jean Rouch n’en dispose pas encore. Inspiré et guidé par ses amis nigériens d’Abidjan, Rouch tourne en 16mm Kodachrome et en son témoin ce drôle de documentaire, où il y a un scénario, des dialogues, des acteurs, une intrigue, des scènes de rêve, tout cela nourri et documenté par l’errance réelle de ces exilés d’une colonie dans une autre. Éclate ici la dimension fictionnelle du grand cinéma documentaire, qui raconte des histoires aussi décousues que la vie, fait apparaître des personnages aussi fantomatiques, opaques ou transparents que ceux de la vraie vie, ouvre autant de question, y répond aussi peu. Cette fois encore, l’absence de son direct allège le montage (…). Mais ici la bande son renverse la bande image. On sait que Rouch a montré son film – une fois monté – à ses acteurs, les invitant à se « doubler », à se commenter, se raconter pendant la projection, dans la salle devenue auditorium. Le jeu est saisissant. Une liberté d’après coup soulève le film. (…) La liberté regagnée au son par les personnages du film est d’autant plus belle, plus troublante, qu’elle est conquête du colonisé sur la langue du maître (le français). On comprend ainsi comment les contraintes ou les enjeux dits « techniques » ne sont pas innocents. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:48:29

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Regards critiques S01-E03 : L'Homme d'Aran

6/1/2022
Filmer pour voir, filmer pour comprendre. Dans L’Homme d’Aran, Robert Flaherty suppose, hypothèse, que le monde resterait fragmentation et chaos, menace et mort, s’il n’y avait le cinéma. Qu’en est-il de ce qu’on appelle « documentaire »? Que nous apprend la pratique de celui qui passe pour avoir fondé le genre? Perdu sur son île qui est en même temps salle de montage et labo, Flaherty se demande jour après jour si, pour lui, la seule « réalité » n’est pas la réalité filmée, si, autrement dit, la robe sans couture de la réalité ne devient pas au cinéma collage des lambeaux innombrables du manteau d’Arlequin? Montage, illusion, croyance: le spectateur est aveuglé par ce qu’il voit, alors que le cinéaste ne croit que ce qu’il filme. Cela donne un film enragé, où s’oppose à la violence du vent, des tempêtes, des requins, des pierres mêmes, la non moins grande violence des images. Encore une fois, l’impossibilité technique (et pratique, en l’occurrence) de prendre du son direct synchrone ouvre à une démultiplication des puissances du montage. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:50:34

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Regards critiques S01-E02 : L'Homme à la caméra

6/1/2022
Hymne à la toute-puissance du cinéma, "L’Homme à la caméra" (Dziga Vertov, 1929) reste l’un des films les plus étonnants de l’histoire. Moins le manifeste d’un nouveau « cinéma-vérité », comme le voulait son auteur, que le déploiement sans frein des vertiges du montage. Ici, la théorie du cinéma s’inscrit à même la pellicule, dans un ballet paroxystique de jeux de miroirs et de truquages ; et dans la liaison fatale entre l’analyse du mouvement et sa synthèse se jouent la vie et la mort des images. Vertov ne célèbre pas seulement l’avènement d’une nouvelle espèce humaine: le cameraman; il se soucie du regard, du désir de voir, de l’excès même du visible, de la saturation du monde par les images, bref, il invente le cinéspectateur. Mais 1929 est aussi l’année qui marque la naissance du cinéma sonore, dans les studios du moins, pour les stars, et par conséquent ni dans les rues, ni pour les hommes et femmes ordinaires du cinéma documentaire : Vertov, qui rêve sans doute d’un cinéma sonore encore hors de portée, tente de conférer aux images le pouvoir d’évoquer les sons. Nous aurons à nous interroger sur le décalage qui se manifeste alors entre bande image et bande son, qui va durer jusqu’au début des années 60. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:00:42:50

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Regards critiques S01-E01 : Films Lumière 1895-1905

6/1/2022
Comment recevoir aujourd’hui l’émerveillement et l’effroi tout ensemble des spectateurs de la première séance du cinématographe Lumière ? Quelle était cette peur, cette surprise ? Le cinéma s’est fondé sous le double signe du spectaculaire et de l’infra-visible : la locomotive surgissant sur l’écran et la tremblée des feuilles aux arbres du jardin. À partir de la projection de quelques-uns des films Lumière, cette séance inaugurale entend prendre acte des ambiguïtés qui marquent la naissance du cinématographe : entre « documentaire » et « fiction », entre science et magie, entre illusion et doute. D’emblée, les principaux paramètres de ce qui s’appellera plus tard « cinéma » sont posés dans leur ambivalence: le cadre est un cache, la profondeur de l’image une illusion, le mouvement lui-même un artefact et la caméra une bien drôle de machine… Nous tenterons de mesurer à la fois la distance qui sépare le spectateur d’aujourd’hui de celui des premiers films, et ce qu’ils ont – encore – en commun. Cet épisode a été préparé par Catherine Blangonnet Introduction : Nathalie Nosny Avec : Jean-Louis Comolli Réalisation : Michel Bourzeix et Catherine Blangonnet Musique : Variations Goldberg, BWV. 988 - Variatio 18. Canone alla Sexta. a 1 Clav. (Musopen) Ce podcast a été enregistré dans les espaces du Centre Pompidou. Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

Duration:01:19:47